Cette responsabilité de la banque dans le cadre d'une opération de défiscalisation est retenue par cet arrêt :
"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 24 mars 2011), que M. et Mme X... sont entrés en relation, en janvier 2004, avec la Banque régionale de l'Ouest aux droits de laquelle vient le Crédit industriel de l'Ouest-Cio (la banque) et avec la société CM-Cic-Afedim, agence immobilière du même groupe financier (la société Afedim), dans le but d'effectuer un investissement leur permettant la défiscalisation de leurs revenus ; qu'après leur avoir fourni la plaquette relative au projet de rénovation d'un monument historique, présentant l'immeuble, le statut fiscal attaché à son classement, les plans des futurs appartements, le prix des différents lots et le coût prévisible des travaux répartis par lot, la société Afedim a réalisé deux études personnalisées mettant en évidence un gain à terme d'un certain montant et une économie d'impôts significative; qu'à la suite de ces études, M. et Mme X... ont acquis deux appartements en juillet 2004, en empruntant à la banque la totalité de la somme correspondant au montant de l'investissement; qu'ayant dû faire face à une majoration sensible des coûts de construction ainsi qu'à un avis de redressement fiscal, ils ont recherché la responsabilité de la banque et de la société Afedim pour manquement à leur obligation d'information et de conseil ;
Attendu que la banque et la société Afedim font grief à l'arrêt de les avoir condamnées in solidum à verser à M. et Mme X... la somme de 120 000 euros en réparation de leur préjudice, outre une indemnité de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel, alors, selon le moyen, que l'obligation de conseil ne s'applique pas aux faits qui ne pouvaient être connus lors de la conclusion du contrat ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt qu'en raison de leur activité professionnelle et de leur niveau de responsabilité, M. et Mme X... étaient aptes à comprendre l'équilibre financier et le fonctionnement de l'opération de défiscalisation litigieuse et qu'ils ne pouvaient se méprendre sur le fait que l'étude personnalisée présentée par la société Afedim en janvier 2004 constituait une simple estimation sans valeur contractuelle, ce qu'elle précisait, établie à partir de données sans caractère définitif, puisqu'il n'était pas fait état dans la plaquette annonçant l'opération de rénovation d'une date de livraison ou d'un montant définitif des travaux à réaliser ; que l'arrêt énonce également que le risque de surcoût des travaux estimatifs habituellement admis et connu dans ce type d'opération est de 10 %, mais qu'il avait atteint plus de 37 % en l'espèce ; qu'il était en outre constant que le surcoût ainsi atteint par les travaux par rapport aux estimations prévisionnelles initiales était essentiellement dû à l'importance des travaux exigés par l'architecte des bâtiments de France en 2006, soit deux ans après la vente, et votés le 30 mai 2006 par assemblée générale de l'Association syndicale libre « Hôtel Toutin », à l'unanimité des sociétaires (dont M. et Mme X...) décidant d'un budget supplémentaire de 800 000 euros à ce titre ; qu'il en résultait que le surcoût en définitive supporté par les acquéreurs, due à l'évolution exceptionnelle, postérieurement à la conclusion des contrats de vente et de prêt, de la masse des travaux à réaliser, ne pouvait être connu ou prévu par les exposants lors de la conclusion de ces contrats ; que dès lors, en imputant à faute aux exposants de ne pas avoir attiré l'attention M. et Mme X... sur le risque de voir évoluer le coût des travaux estimatifs dans des proportions très au-delà de la marge de 10 % habituellement admise et connue, en raison d'hypothétiques exigences de l'architecte des bâtiments de France dans le futur qu'ils ne pouvaient connaître, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'après avoir relevé qu'intervenant pour proposer et personnaliser un investissement relevant de législations complexes, il appartenait à la banque et à la société Afedim d'informer M. et Mme X..., en corollaire des avantages annoncés par l'étude, des aspects moins favorables et des risques inhérents à l'acquisition de ce type de produit immobilier, l'arrêt retient que cette information aurait dû être délivrée avant que les investisseurs ne s'engagent, de sorte que le comportement et les votes de M. et Mme X... lors des différentes assemblées générales de l'association syndicale libre sont indifférents ; qu'il retient encore qu'aucun élément n'établit qu'ils disposaient de connaissances solides leur permettant d'appréhender les aléas constructifs et fiscaux pouvant résulter de l'opération proposée et qu'aucune information contenue dans le projet de rénovation qui leur a été présenté ne leur permettait d'envisager que le coût des travaux énoncé à titre estimatif pouvait évoluer dans des proportions très au delà de la marge de 10 % habituellement admise et connue même de non spécialistes, pour atteindre plus de 37 %; qu'il retient enfin qu'il appartenait à la banque et à la société Afedim au fait de ce type d'investissement et des contraintes posées par ce secteur immobilier d'attirer l'attention des clients sur ce point, d'autant plus que la plaquette réalisée était muette sur les conditions dans lesquelles avait été défini le coût prévisionnel des travaux et leur validation par l'architecte des bâtiments de France; que, de ces constatations et appréciations faisant ressortir que les renseignements sur le coût des travaux fournis par la banque et la société Afedim, lors de la conclusion de l'opération d'investissement par M. et Mme X..., n'avaient pas permis à ces derniers de mesurer l'importance du risque en découlant, la cour d ‘appel a pu déduire que la banque et la société avaient manqué à leur devoir d'information et de conseil, en les privant de la possibilité d'évaluer, en toute connaissance de cause, l'adéquation de l'opération proposée à leur situation et à leur attente; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches, ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Banque CIC Ouest et la société CM-CIC Afedim aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit janvier deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour la société Banque CIC Ouest et de la société CM-CIC Afedim
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné in solidum la BANQUE CIC OUEST, anciennement dénommée le Crédit Industriel de l'Ouest, venant aux droits de la Banque Régionale de l'Ouest, et la Société CM-CIC AFEDIM à verser à Monsieur et Madame X... la somme de 120.000 € en réparation de leur préjudice, outre une indemnité de 6.000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
AUX MOTIFS QU'il est établi par les pièces produites aux débats et les écritures des parties devant la cour, que les époux X..., qui n'étaient pas clients de la banque BRO devenue CIO, ont noué contacts en janvier 2004 avec cet établissement et avec la Société AFEDIM, agence immobilière du groupe CIO, sans que les modalités concrètes d'établissement de ces relations ne soient d'ailleurs précisées, avec le souhait clairement énoncé de réaliser un investissement leur permettant une défiscalisation de leurs revenus d'un niveau important.
En réponse à cette demande, leur a été fournie par la Société AFEDIM la plaquette, relative au projet de rénovation de l'Hôtel TOUTIN, classé monument historique, propriété de la Société MINERVE, présentant l'immeuble, le statut fiscal attaché à son classement, les plans des futurs appartements, le prix des différents lots et le coût prévisible des travaux répartis par lot. Sur la base de ces coûts, la Société AFEDIM a alors réalisé deux études personnalisées à partir des revenus des époux X..., en en modifiant la base par l'intégration dans leurs ressources de dividendes provenant de leur société, ce dont attestent les déclarations fiscales. L'estimation réalisée sur une durée de 16 ans, prenant en compte un revenu locatif à compter de juin 2007 et opérant la déduction du montant total des travaux outre les intérêts d'emprunt et autres charges mettait en évidence un gain à terme estimé entre 360.000 et 402.000 € et une économie d'impôts significative, après avoir prévu le financement complet de l'opération par des prêts souscrits auprès de la BRO. La nature de la demande des époux X..., celle de l'opération envisagée, l'organisation de son montage et les moyens dépendant de la banque mis en oeuvre pour la présenter aux investisseurs démontrent que le rôle du banquier ne s'est pas limité comme il le prétend à une simple intervention ponctuelle en qualité de prêteur de deniers, tandis que celui de la Société AFEDIM ne peut être résumé comme elle le soutient à une prestation d'agence immobilière, ayant simplement rapproché vendeur et acquéreurs, ce d'autant que les promesses de vente engageant la Société MINERVE versées aux débats par les intimés, les actes authentique n'étant pas produits, ne portent pas mention de l'intervention d'une agence immobilière ou d'honoraires de négociation. Elles révèlent au contraire une participation conjointe de la Société BRO et la Société AFEDIM à la concrétisation de l'investissement présenté aux appelants. Intervenant pour proposer et personnaliser un investissement relevant de législations complexes (rénovation d'un monument classé et application des avantages fiscaux), il appartenait à la banque et à la Société AFEDIM d'informer les époux X..., en corrolaire des avantages annoncés par l'étude, des aspects moins favorables et des risques inhérents à l'acquisition de ce type de produit immobilier. Il est constant que cette information doit être délivrée avant que les investisseurs ne s'engagent, de sorte que le comportement et les votes des époux X... lors des différentes assemblées générales de l'association syndicale libre sont indifférents et ne peuvent atténuer un éventuel manquement à l'obligation d'information et de conseil. A cet égard, il n'est pas contestable que de par leur activité professionnelle et leur niveau de responsabilité, Monsieur et Madame X... étaient en mesure de comprendre l'équilibre financier de l'opération et le fonctionnement de la défiscalisation et ne pouvaient se méprendre sur le fait que l'étude personnalisée réalisée en janvier 2004, constituaient une estimation qui n'avait pas de valeur contractuelle, ce qu'elle précisait, établie à partir de données sans caractère définitif, puisqu'il n'était pas fait état dans la plaquette annonçant l'opération de rénovation d'une date de livraison ou d'un montant définitif de travaux. Par contre, aucun élément n'établit qu'ils disposaient de connaissances solides leur permettant d'appréhender les aléas constructifs et fiscaux pouvant résulter de l'opération proposée. A cet égard, aucune information contenue dans le projet de rénovation qui leur a été présenté par les intimés ne leur permettait d'envisager que le coût des travaux énoncé certes à titre estimatif pouvait évoluer dans les proportions très au-delà de la marge de 10% habituellement admise et connue même de non spécialistes, pour atteindre plus de 37% en raison essentiellement d'exigences de l'architecte des bâtiments de France et de l'état de l'immeuble après un examen attentif, alors que les coûts annoncés représentaient déjà un montant supérieur au prix des appartements. Dès lors, il appartenait aux professionnels au fait de ce type d'investissement et des contraintes posées par ce secteur immobilier d'attirer particulièrement l'attention des clients sur ce point, ce d'autant que la plaquette réalisée par le vendeur était muette sur les conditions dans lesquelles avait été défini le coût prévisionnel des travaux et sur leur validation par l'architecte des bâtiments de France. Par ailleurs, ils devaient informer précisément les candidats à l'investissement de ce que la possibilité de déduire fiscalement l'intégralité du coût des travaux, élément important de l'avantage accordé, était beaucoup plus complexe et subtile à mettre en oeuvre que ce qui était énoncé dans le projet de rénovation de la Société MINERVE et dépendait de la nature et de l'ampleur des travaux de rénovation effectués dans les lieux ainsi que de leur destination initiale, paramètres qui pouvaient donner lieu à contestation et discussion de la part de l'administration fiscale, le contentieux sur ce point étant relativement fréquent, avec un risque final de redressement. La délivrance de celle information était d'autant plus importante pour guider les époux X... dans leur choix, que les travaux devant être menés par les propriétaires investisseurs regroupés au sein d'une association syndicale, ils se trouvaient soumis aux décisions majoritaires de cette structure, quant à la définition des travaux à réaliser. La banque, pas plus que la Société AFEDIM, professionnelles au fait des risques présentés par les investissements qu'elles proposent ne justifient avoir attiré l'attention des époux X..., sur ces deux points avant qu'ils ne s'engagent dans cet investissement. Le manquement à leur obligation d'information et de conseil est par suite établi. Cette méconnaissance de leur obligation a ainsi privé les époux X... de la possibilité d'évaluer en toute connaissance de cause, l'adéquation de l'opération proposée à leur situation et à leur attente et de se diriger vers d'autres produits défiscalisés d'un fonctionnement plus simple, préjudice qui s'analyse en une perte de chance de ne pas contracter, qui ne peut qu'être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée. Les éléments communiqués quant au coût final de l'opération de rénovation pour les époux X..., à son impact sur le rendement locatif, à la prise de position de l'administration fiscale quant à l'étendue des déductions permettent d'évaluer le préjudice des époux X... à la somme de 120. 000 €, qui sera supportée in solidum par les intimés, ayant contribué également à la réalisation de l'entier préjudice des appelants. Le jugement sera réformé sur ce point ;
1) ALORS QUE l'obligation de conseil ne s'applique pas aux faits qui ne pouvaient être connus lors de la conclusion du contrat ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt qu'en raison de leur activité professionnelle et de leur niveau de responsabilité, les époux X... étaient aptes à comprendre l'équilibre financier et le fonctionnement de l'opération de défiscalisation litigieuse et qu'ils ne pouvaient se méprendre sur le fait que l'étude personnalisée présentée par la Société AFEDIM en janvier 2004 constituait une simple estimation sans valeur contractuelle, ce qu'elle précisait, établie à partir de données sans caractère définitif, puisqu'il n'était pas fait état dans la plaquette annonçant l'opération de rénovation d'une date de livraison ou d'un montant définitif des travaux à réaliser ; que l'arrêt énonce également que le risque de surcoût des travaux estimatifs habituellement admis et connu dans ce type d'opération est de 10 %, mais qu'il avait atteint plus de 37 % en l'espèce ; qu'il était en outre constant que le surcoût ainsi atteint par les travaux par rapport aux estimations prévisionnelles initiales était essentiellement dû à l'importance des travaux exigés par l'architecte des bâtiments de France en 2006, soit deux ans après la vente, et votés le 30 mai 2006 par assemblée générale de l'Association Syndicale Libre « Hôtel TOUTIN », à l'unanimité des sociétaires (dont les époux X...) décidant d'un budget supplémentaire de 800.000 € à ce titre ; qu'il en résultait que le surcoût en définitive supporté par les acquéreurs, due à l'évolution exceptionnelle, postérieurement à la conclusion des contrats de vente et de prêt, de la masse des travaux à réaliser, ne pouvait être connu ou prévu par les exposants lors de la conclusion de ces contrats ; que dès lors, en imputant à faute aux exposants de ne pas avoir attiré particulièrement l'attention des époux X... sur le risque de voir évoluer le coût des travaux estimatifs dans des proportions très au-delà de la marge de 10 % habituellement admise et connue, en raison d'hypothétiques exigences de l'architecte des bâtiments de France dans le futur qu'ils ne pouvaient connaître, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;
2) ALORS, EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, QUE reprenant la motivation des premiers juges, les exposants soutenaient dans leurs conclusions d'appel qu'en votant les résolutions de l'assemblée générale du 30 mai 2006 décidant du choix des entreprises et de la réalisation de travaux supplémentaires pour un montant de 800.000 €, les époux X... avaient contribué à l'augmentation du coût des travaux dénoncée ; que dès lors, en refusant de prendre en considération la participation des époux X... aux décisions à l'origine du surcoût de travaux dont ils réclamaient le paiement à titre de dommages et intérêts, la Cour d'appel, qui a omis de rechercher si ceux-ci n'avaient pas contribué à leur propre dommage, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
3) ALORS, EN OUTRE, QUE dans leurs conclusions d'appel, les exposants soutenaient qu'il appartenait à l'Association Syndicale libre « Hôtel TOUTIN » et à chacun de ses membres de s'assurer, en 2006, en votant les travaux, qu'ils étaient compatibles avec la défiscalisation projetée, la banque et la Société AFEDIM, qui d'ailleurs n'avaient pas été consultées, ne pouvant se substituer aux époux X... et aux autres investisseurs dans cette appréciation alors que leur intervention s'était achevée deux plus tôt, en 2004 ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, pourtant de nature à exonérer les exposants de toute responsabilité, au titre du préjudice fiscal allégué, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
4) ALORS ENFIN QUE pour être réparable, un préjudice doit être direct, actuel et certain ; qu'en l'espèce, dans leurs conclusions d'appel, les exposants faisaient valoir qu'il résultait de la consultation établie par le conseil fiscaliste des épou X... (pièce adverse n° 15) qu'en refusant la déductibilité des travaux litigieux, l'administration fiscale avait commis une erreur de droit, le Conseil d'État décidant au contraire que le montant de tels travaux était déductible des revenus fonciers dans les conditions prévues par le § b du 1° de l'article 31 du Code général des impôts et que le 28 janvier 2001, soit deux ans après le redressement fiscal du 28 juillet 2008, les époux X... venaient d'introduire une réclamation contentieuse devant le juge fiscal (pièce adverse n° 28), lequel ne s'était pas encore prononcé sur la déductibilité des travaux et le bien-fondé du redressement litigieux ; qu'il en résultait que la dette fiscale alléguée dépendait de l'issue de la procédure en cours devant la juridiction administrative ; que le dès lors, en omettant de rechercher, comme elle y était invitée, si en raison du contentieux en cours, le préjudice fiscal allégué par les époux X... n'était pas seulement éventuel et incertain, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil."
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