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dimanche 29 mai 2016

Liberté de la presse et droit à l'oubli

Deux personnes se plaignaient de ce que sur le site de la société les Echos leur nom apparaît, relativement à une décision de justice, et souhaitaient que ce nom n'apparaisse plus. La Cour considère que que le fait d'imposer à un organe de presse, soit de supprimer du site internet dédié à l'archivage de ses articles, qui ne peut être assimilé à l'édition d'une base de données de décisions de justice, l'information elle-même contenue dans l'un de ces articles, le retrait des nom et prénom des personnes visées par la décision privant celui-ci de tout intérêt, soit d'en restreindre l'accès en modifiant le référencement habituel, excède les restrictions qui peuvent être apportées à la liberté de la presse.


"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 février 2014), que, par acte du 27 octobre 2010, MM. Stéphane et Pascal X... ont assigné la société Les Echos, sur le fondement de l'article 38 de la loi du 6 janvier 1978, aux fins de voir ordonner la suppression des données à caractère personnel les concernant des traitements automatisés du site internet « LesEchos.fr », au motif que l'utilisation de leur nom de famille comme mot-clé sur les moteurs de recherche de ce site donnait accès, en premier rang, au titre suivant : « le Conseil d'Etat a réduit la sanction des frères X... à un blâme », faisant référence à un article archivé sur le même site et publié dans le journal « Les Echos » du 8 novembre 2006 ;

Attendu que MM. X... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande, alors, selon le moyen :

1°/ que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que dans leurs conclusions d'appel, MM. Stéphane et Pascal X... s'étaient prévalus, à l'appui de leur demande de retrait de leur nom et prénom des moteurs de recherche du journal Les Echos, de leur droit, édicté à l'article 38 de la loi du 6 janvier 1978, de s'opposer pour des motifs légitimes à ce que des données à caractère personnel les concernant fassent l'objet d'un traitement ; qu'en énonçant, pour leur dénier le droit de s'en prévaloir, que ces dispositions ne seraient pas applicables et céderaient devant les dispositions dérogatoires prévues par le 2° de l'article 67 de la loi du 6 janvier 1978 visant « les traitements de données à caractère personnel mis en oeuvre aux seules fins... d'exercice, à titre professionnel, de l'activité de journaliste, dans le respect des règles déontologiques de cette profession », dès lors qu'il s'agirait de l'archivage d'articles de presse, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige non constitué par une demande de désarchivage d'articles de presse, violant ainsi l'article 4 du code de procédure civile ;

2°/ que tout individu a droit à ce que l'information relative à sa personne ne soit plus liée à son nom par une liste de résultats affichée à la suite d'une recherche effectuée à partir de son nom ; que pour rejeter la demande de MM. Stéphane et Pascal X... de désindexation de leur nom et prénom des moteurs de recherche du site internet du journal Les Echos, la cour d'appel s'est fondée sur l'absence d'inexactitude entachant l'article de presse relatant l'annulation, par les deux arrêts du Conseil d'Etat en date du 13 juillet 2006, des décisions de retrait de leur carte professionnelle d'intervenant sur les marchés financiers ; qu'en se fondant sur des motifs inopérants et insusceptibles d'être opposés au droit à l'oubli numérique de MM. Stéphane et Pascal X..., l'exactitude du contenu d'articles de presse ne pouvant priver les intéressés de leur droit à l'oubli numérique, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 9 du code civil, des articles 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union et des articles 1er et suivants de la directive 95/46/CE du 24 octobre 1995 ;

Mais attendu qu'en retenant, par des motifs non critiqués, que le fait d'imposer à un organe de presse, soit de supprimer du site internet dédié à l'archivage de ses articles, qui ne peut être assimilé à l'édition d'une base de données de décisions de justice, l'information elle-même contenue dans l'un de ces articles, le retrait des nom et prénom des personnes visées par la décision privant celui-ci de tout intérêt, soit d'en restreindre l'accès en modifiant le référencement habituel, excède les restrictions qui peuvent être apportées à la liberté de la presse, la cour d'appel a légalement justifié sa décision, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la première branche ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne MM. Stéphane et Pascal X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de MM. Stéphane et Pascal X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour MM. Stéphane et Pascal X... 

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté MM. Stéphane et Pascal X... de leurs demandes tendant à ce qu'il soit ordonné à la société Les Echos la suppression de leurs données personnelles à la fois du titre et du texte de tous les traitements automatiques du site web «lesechos.fr » ainsi qu'à la condamnation de la société Les Echos à leur verser, à chacun, différentes sommes en réparation de leurs préjudices ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, comme l'ont retenu les premiers juges, les dispositions dérogatoires prévues par le 2° de l'article 67 de la loi du 6 janvier 1978 visant « les traitements des données à caractère personnel mis en oeuvre aux seules fins... d'exercice à titre professionnel de l'activité de journaliste, dans le respect des règles déontologiques de cette profession» sont applicables en l'espère s'agissant de l'archivage d'articles de presse ; que les demandeurs ne peuvent donc se prévaloir que des dispositions de l'article 38 de la ladite loi qui permettent à toute personne physique « de s'opposer pour des motifs légitimes à ce que des données à caractère personnel la concernant fassent l'objet d'un traitement » ; que, contrairement à ce que soutiennent les appelants, ni le titre de l'article qui apparaît en première page du moteur de recherche Google lorsque leur patronyme est utilisé comme mot-clé, ni l'article lui-même librement accessible sur le site des Echos ne contiennent la moindre inexactitude puisqu'il est fait état de ce que la sanction prononcée à l'égard des frères X..., qui n'ont pas été « blanchis » comme ils le prétendent, a été considérablement réduite, la précision étant donnée dans l'article que «seule une partie des manquements qui avaient justifié les poursuites devait être retenue… » ; qu'il n'est pas soutenu que des évènements postérieurs seraient venus modifier la pertinence de cette information, le motif allégué, à savoir les difficultés rencontrées pour retrouver un emploi dans le milieu de la finance ne pouvant être imputé à l'article même, mais à la lecture qu'en font les professionnels ; qu'imposer à un organe de presse de supprimer de son site Internet dédié à l'archivage de ses articles, lequel ne peut s'assimiler à l'édition d'une base de données des décisions de justice, soit l'information elle-même, le retrait des noms et prénoms des personnes visées par la décision vidant l'article de tout intérêt, soit d'en restreindre l'accès en modifiant le référencement habituel, excèdent, ainsi que l'a estimé le tribunal, les restrictions qui peuvent être apportées à la liberté de la presse ;

et AUX MOTIFS ADOPTES QUE les dispositions dérogatoires prévues par le 2° de l'article 67 de la loi du 6 janvier 1978 visant « les traitements de données à caractère personnel mis en oeuvre aux seules fins... d'exercice, à titre professionnel, de l'activité de journaliste, dans le respect des règles déontologiques de cette profession » trouvent application en l'espèce s'agissant de l'archivage d'articles de presse ; qu'en conséquence les demandeurs ne peuvent que se prévaloir des dispositions de l'article 38 de la ladite loi qui permettent à toute personne physique « de s'opposer, pour des motifs légitimes, à ce que des données à caractère personnel la concernant fassent l'objet d'un traitement » ; qu'à cet égard, s'agissant des motifs qui sont invoqués par les demandeurs, il convient de relever que, contrairement à ce qu'ils prétendent, ni le titre de l'article litigieux qui apparaît en première page du moteur de recherche Google lorsque leur patronyme est utilisé comme mot clé, ni l'article lui-même librement accessible sur le site des Echos, ne sont tendancieux, équivoques ou fautifs ; qu'en effet, le titre indique que la sanction prononcée à leur égard a été réduite à un blâme par le Conseil d'Etat, l'article lui-même apportant plus de précisions et notamment que « la juridiction d'appel a estimé que seule une partie des manquements qui avaient justifié les poursuites devant le CMF devait être retenue. » ; que ces textes ne contiennent ni inexactitude ni présentation déloyale ou partisane ; qu'aucun évènement postérieur, autre que le passage du temps, ne vient non plus affecter la pertinence de ces textes ; que, s'agissant de l'argumentation fondée sur le fait que la puissance et la généralisation des moteurs de recherche modernes font obstacle à l'effacement naturel dans la mémoire humaine de cette affaire ancienne qui, sans aucune limitation de durée, se retrouve au premier plan du premier moyen de communication, soit le moteur de recherche Google, que le tribunal considère que cet argument est, en lui-même, insuffisant pour que soit ordonnée la suppression de l'article en cause ou même de son référencement à partir des nom et prénom des demandeurs, sur le moteur de recherche du site « leséchos.fr », de telles mesures portant atteinte à la liberté d'expression ainsi qu'à une de ses composantes, celle de recevoir des informations ; qu'en conséquence, faute de justifier d'un « motif légitime» au sens de l'article 38 de la loi du 6 janvier 1978, les demandes de Pascal et Stéphane X... seront rejetées ;

1°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que dans leurs conclusions d'appel, MM. Stéphane et Pascal X... s'étaient prévalus, à l'appui de leur demande de retrait de leur nom et prénom des moteurs de recherche du journal Les Echos, de leur droit, édicté à l'article 38 de la loi du 6 janvier 1978, de s'opposer pour des motifs légitimes à ce que des données à caractère personnel les concernant fassent l'objet d'un traitement ; qu'en énonçant, pour leur dénier le droit de s'en prévaloir, que ces dispositions ne seraient pas applicables et céderaient devant les dispositions dérogatoires prévues par le 2° de l'article 67 de la loi du 6 janvier 1978 visant « les traitements de données à caractère personnel mis en oeuvre aux seules fins... d'exercice, à titre professionnel, de l'activité de journaliste, dans le respect des règles déontologiques de cette profession», dès lors qu'il s'agirait de l'archivage d'articles de presse, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige non constitué par une demande de désarchivage d'articles de presse, violant ainsi l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE tout individu a droit à ce que l'information relative à sa personne ne soit plus liée à son nom par une liste de résultats affichée à la suite d'une recherche effectuée à partir de son nom ; que pour rejeter la demande de MM. Stéphane et Pascal X... de désindexation de leur nom et prénom des moteurs de recherche du site internet du journal Les Echos, la cour d'appel s'est fondée sur l'absence d'inexactitude entachant l'article de presse relatant l'annulation, par les deux arrêts du Conseil d'Etat en date du 13 juillet 2006, des décisions de retrait de leur carte professionnelle d'intervenant sur les marchés financiers ; qu'en se fondant sur des motifs inopérants et insusceptibles d'être opposés au droit à l'oubli numérique de MM. Stéphane et Pascal X..., l'exactitude du contenu d'articles de presse ne pouvant priver les intéressés de leur droit à l'oubli numérique, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 9 du code civil, des articles 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union et des articles 1 et suivants de la directive 95/46/CE du 24 octobre 1995."

samedi 28 mai 2016

La vente à la boule de neige

Un article à lire ici : Boule de neige et droit pénal

La vente à la boule de neige est une pratique commerciale déloyale qui repose sur un mécanisme enfantin et ancien de promotion pyramidale. Il consiste à vendre un article à un individu, moins cher que son prix réel, à condition qu'il trouve de nouveaux clients, lesquels, afin de bénéficier de l'offre avantageuse, devront également trouver d'autres clients et ainsi de suite. Ce procédé est fondé sur une progression géométrique du nombre des acheteurs. Avant que le législateur n’intervienne pour en interdire le procédé, la chambre criminelle de la Cour de cassation avait considéré qu'il s'agissait d'une escroquerie (Crim. 7 mai 1951).