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dimanche 14 juillet 2013

Le bail perpétuel

Quelques observations sur le bail perpétuel.


1) La bail perpétuel est interdit par l'article 1709 du code civil :


"Le louage des choses est un contrat par lequel l'une des parties s'oblige à faire jouir l'autre d'une chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que celle-ci s'oblige de lui payer."

2) L'action en nullité du bail perpétuel ne peut faire l'objet d'une renonciation par le bailleur :



"Sur le pourvoi formé par le Centre de coopération international en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), Etablissement public industriel et commercial, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 19 mai 1994 par la cour d'appel de Paris (16e chambre section B), au profit de la société La Métropole, société anonyme, dont le siège social est anciennement ... et actuellement, ...,

défenderesse à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt;

LA COUR, en l'audience publique du 27 mars 1996, où étaient présents : M. Beauvois, président, Mme Stéphan, conseiller rapporteur, MM. Deville, Aydalot, Boscheron, Toitot, Mmes Di Marino, Borra, MM. Bourrelly, Peyrat, Cachelot, conseillers, MM. Chollet, Nivôse, Pronier, conseillers référendaires, M. Lucas, avocat général, Mme Pacanowski, greffier de chambre;

Sur le rapport de Mme le conseiller Stéphan, les observations de la SCP Ryziger et Bouzidi, avocat du CIRAD, de Me Baraduc-Benabent, avocat de la société La Métropole, les conclusions de M. Lucas, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;

Sur le premier moyen :

Attendu que le Centre de coopération international en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), auquel les biens de l'Institut de recherche pour les huiles et oléagineux (IRHO) ont été dévolus, fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 19 mai 1994) de dire qu'il est occupant sans droit ni titre des immeubles sis ..., loués à l'IRHO, et, en conséquence, de le condamner à libérer les lieux et à payer diverses indemnités au bailleur, la société Métropole, alors, selon le moyen, "1°) que le titulaire d'un droit, fût-il d'ordre public, peut y renoncer dès lors que ce droit est entré dans son patrimoine;

qu'en l'espèce, le CIRAD avait fait valoir que le bailleur s'était engagé à renouveler le bail selon lettre en date du 25 septembre 1956, confirmée le 9 avril 1958 ;

qu'ayant constaté que la société la Métropole avait pris l'engagement, le 25 septembre 1956, de renouveler les baux de l'IRHO, non seulement à la fin des baux en cours, mais également à chaque période de renouvellement, la cour d'appel qui, cependant, considère que cet engagement, confirmé le 9 avril 1958, était nul, l'article 1709 du Code civil prohibant les baux perpétuels, sans préciser si cet engagement avait été contracté concomitamment ou postérieurement à la conclusion des baux, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et suivants du Code civil, ensemble l'article 1709 dudit Code; 2°) que le CIRAD avait fait valoir qu'ayant succédé au précédent locataire par voie de dévolution de ses biens, en connaissance du bailleur qui avait perçu les loyers, avec TVA et non le droit de 2,5 %, ce dernier avait ainsi manifesté sa volonté de soumettre le bail au décret du 30 septembre 1953 et qu'en conséquence de cette renonciation le CIRAD avait droit au renouvellement du bail par application de ladite loi; qu'en considérant que le fait que les biens de l'Association IRHO aient été dévolus au CIRAD, lequel était habilité par l'article 2-3° du décret du 30 septembre 1953 à bénéficier d'un bail commercial, ne pouvait avoir pour effet de transformer à son profit un bail civil en bail commercial et en ajoutant que le fait pour la bailleresse d'avoir accepté le paiement des loyers par le Centre ne signifie nullement qu'elle a agréé celui-ci comme locataire, la perception des fonds n'étant que la contrepartie de la prestation reçue, l'occupation des lieux, la cour d'appel n'a pas recherché si, par ces actes dénués d'équivoque, le bailleur n'avait pas, renonçant au statut civil du bail, admis l'application du décret du 30 septembre 1953, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil, ensemble les articles 1 et suivants du décret du 30 septembre 1953";

Mais attendu qu'ayant, d'une part, pu déduire des termes de l'engagement du bailleur du 25 septembre 1956, renouvelé le 9 avril 1958, que cet engagement était nul en application de l'article 1709 du Code civil qui prohibe les baux perpétuels, d'autre part, retenu que la dévolution des biens du locataire, l'IRHO, association régie par la loi du 1er juillet 1901, exclue du bénéfice du décret du 30 septembre 1953, ne pouvait avoir pour effet de transformer un bail de droit commun en bail commercial, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision de ce chef;

Sur le second moyen :

Attendu que le CIRAD fait grief à l'arrêt de le déclarer occupant sans droit et, en conséquence, de le condamner à libérer les lieux et à payer diverses indemnités au bailleur, la société Métropole, alors, selon le moyen, "1°) qu'il avait fait valoir que les baux conclus en 1986 étaient signés par la société AGF qui était sans droit à le faire dès lors qu'elle n'avait pas été mandatée à cet effet par la société la Métropole, bailleresse et qu'en conséquence, le CIRAD avait droit au renouvellement des baux, conformément aux baux antérieurs qui avaient été renouvelés par tacite reconduction; qu'en se contentant d'affirmer que le CIRAD, ne pouvait, sans contradiction, prétendre que les baux sont nuls, tout en en réclamant le bénéfice et en ajoutant que la société La Métropole n'ayant jamais fait valoir que la société AGF ne la représentait pas valablement et que le Centre est sans qualité pour se prévaloir d'une prétendue nullité qui ne lui a porté aucun préjudice, la cour d'appel n'a pas procédé à la recherche à laquelle elle était invitée en ne s'expliquant pas sur la nullité des baux et ses conséquences et a, par là même, privé sa décision de base légale au regard des articles 1 et suivants du décret du 30 septembre 1953, ensemble l'article 1134 du Code civil; 2°) que le CIRAD avait fait valoir que les baux conclus en 1986 étaient signés par la société AGF qui était sans droit à le faire dès lors qu'elle n'avait pas été mandatée à cet effet par la société la Métropole, bailleresse, et qu'en conséquence, le CIRAD avait droit au renouvellement des baux, conformément aux baux antérieurs qui avaient été renouvelées par tacite reconduction; qu'en se contentant d'affirmer que le CIRAD, ne pouvait, sans contradiction, prétendre que les baux sont nuls, tout en en réclamant le bénéfice et en ajoutant que la société la Métropole n'ayant jamais fait valoir que la société AGF ne la représentait pas valablement et que le Centre est sans qualité pour se prévaloir d'une prétendue nullité qui ne lui a porté aucun préjudice, la cour d'appel, qui n'a pas précisé en vertu de quel pouvoir la société AGF avait agi, pour signer les baux, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1123, 1134 et suivants du Code civil, ensemble les articles 1 et suivants du décret du 30 septembre 1953";

Mais attendu qu'ayant retenu, à bon droit, que le CIRAD ne pouvait se prévaloir d'un défaut de pouvoir qui ne lui avait porté aucun préjudice, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le CIRAD à payer à la société Métropole la somme de 8 000 francs en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Le condamne également, envers la société La Métropole, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du quinze mai mil neuf cent quatre-vingt-seize."

 3) Le délai pour agir en nullité du bail perpétuel est de trente ans :


"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 29 octobre 1997), que la commune de Cadeilhan-Trachère ayant donné des terrains à bail à la commune de Saint-Lary Soulan pendant une durée de quatre-vingt-dix-neuf ans, renouvelable au gré du preneur, pour les besoins de fonctionnement d'une station de sports d'hiver, a assigné la commune de Saint-Lary Soulan en annulation de cette convention ;

Attendu que la commune de Cadeilhan-Trachère fait grief à l'arrêt de déclarer son action prescrite, alors, selon le moyen, 1° que l'action en nullité d'un acte conclu sans limitation de durée est imprescriptible et qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1709 et 2262 du Code civil ; 2° que le jugement du tribunal administratif de Pau du 19 juin 1979, qui avait statué sur cette action, avait fait précisément l'objet d'une discussion dans les conclusions des deux parties devant la cour d'appel, que le tribunal de grande instance de Tarbes s'y était expressément référé dans son jugement sur la compétence en date du 24 juillet 1991 et qu'en refusant de se fonder sur cet élément qui avait été spécialement invoqué par les parties à l'appui de leurs prétentions, la cour d'appel a violé les articles 6 et 7 du nouveau Code de procédure civile ; 3° qu'en violation de l'article 455 du même Code, la cour d'appel n'a pas répondu au chef des conclusions de la commune de Cadeilhan-Trachère qui invoquait précisément ce jugement ; 4° qu'en s'abstenant de vérifier si ce jugement du tribunal administratif de Pau du 19 juillet 1991 qui se déclarait incompétent pour statuer sur une demande d'annulation de ce " traité " n'avait pas interrompu la prescription, la cour d'appel a violé l'article 2247 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que si le bail était entaché d'un vice de perpétuité, l'action en nullité du contrat souscrit en 1953 avait été engagée en 1991, la cour d'appel en a exactement déduit que le bail ne pouvant être considéré comme inexistant et l'action en nullité, même absolue, se prescrivant par trente ans, la demande de la commune de Cadeilhan-Trachère était irrecevable ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu que la commune de Cadeilhan-Trachère faisant valoir l'interruption de la prescription de l'action en nullité par une assignation, en 1978, devant le tribunal administratif, n'apportait pas d'explication plus précise ni de justification, la cour d'appel qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions ni de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a pu en déduire qu'elle n'était pas en mesure d'apprécier l'application, au litige, des articles 2246 et 2247 du Code civil ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi."

4) Est perpétuel un bail qui ne se terminera que par la volonté du preneur :


"Vu l'article 1709 du Code civil ;

Attendu que le louage des choses est un contrat par lequel l'une des parties s'oblige à faire jouir l'autre d'une chose pendant un certain temps et moyennant un certain prix que celle-ci s'oblige de lui payer ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 1er mars 1999), que la société civile immobilière Bedega, dénommée postérieurement SCI BE, représentée par M. Garnier, a donné à bail à la société Les Vergers-des-Balans (SVB), représentée par Mme Desmoures, les locaux dans lesquels était exploitée une maison d'accueil et de soins pour personnes âgées ; que l'article 2 de cette convention stipulait que le bail était conclu pour une durée de trois, six, neuf ans à compter du 15 mars 1991, à la volonté du preneur seul, à charge pour lui de prévenir le bailleur de son intention de faire cesser le bail au moins six mois à l'avance par simple lettre recommandée ; que la locataire a rencontré des difficultés financières qui se sont répercutées sur la gestion de la bailleresse ; que la SCI a assigné la SVB, le 17 juillet 1992, en annulation et subsidiairement en résiliation du bail et en paiement de dommages-intérêts, puis, le 12 décembre 1997, en nullité du congé donné par la locataire le 11 septembre 1996 pour le 14 mars 1997 et en paiement de dommages-intérêts ; que les deux instances ont fait l'objet d'une jonction devant la cour d'appel ;

Attendu que, pour débouter la SCI BE de sa demande tendant à la nullité du bail et du congé, l'arrêt retient que les clauses relatives à la résiliation du bail, mal rédigées, doivent être interprétées conformément aux dispositions d'ordre public du décret du 30 septembre 1953 et qu'à les supposer même contraires à ces dispositions elles n'entraînent pas nécessairement la nullité du bail ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que le terme du bail dépendait de la volonté du seul preneur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la SCI BE de sa demande en nullité du bail et de toutes ses autres demandes, l'arrêt rendu le 1er mars 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers."

5) Mais un bail conclu pour la durée de la vie du preneur n'est pas un bail perpétuel :


"Vu les articles 1709 et 1737 du Code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 13 mars 1992), que, suivant acte authentique en date du 27 novembre 1981, Mme X... a donné un immeuble à bail aux époux Y... à compter du 1er janvier 1982 et jusqu'au décès des preneurs ; qu'elle a donné congé à chacun des époux pour le 24 juin 1989 ;

Attendu que, pour déclarer les congés valables et ordonner l'expulsion des époux Y..., l'arrêt retient que la durée du bail n'est pas fixe et déterminable à l'avance, puisqu'elle dépend d'un événement inconnu et imprévisible, à savoir le décès des preneurs, que cet événement constitue un terme contractuel dont l'échéance est incertaine et qu'il ne peut donc être considéré que le contrat de location comportait une durée déterminée ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le bail, dont le terme est fixé par un événement certain, même si la date de sa réalisation est inconnue, est conclu pour une durée déterminée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 mars 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers."

 

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