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dimanche 24 avril 2016

Seul celui qui revendique la propriété d'une parcelle peut invoquer la prescription acquisitive

Seul celui qui revendique la propriété d'une parcelle peut invoquer la prescription acquisitive

C'est ce que juge cet arrêt :



"Attendu, selon l’arrêt attaqué (Poitiers, 16 avril 2014), que M. et Mme X… sont propriétaires d’un immeuble situé en contrebas d’une falaise dont des rochers se sont éboulés sur leur fonds au cours des intempéries de décembre 1999 ; qu’un arrêté municipal a interdit l’accès du jardin jusqu’à la réalisation de travaux de sécurisation ; qu’après expertises, M. et Mme X… ont assigné en indemnisation l’Association immobilière du Poitou, propriétaire du fonds situé en recul des rochers, puis les auteurs de leurs vendeurs et leurs ayants droit, les consorts Y… ;

Attendu que ceux-ci font grief à l’arrêt de les condamner à payer à M. et Mme X… des dommages-intérêts au titre des travaux nécessaires à la consolidation de la falaise et au titre de la privation de jouissance alors, selon le moyen :

1°/ que les créanciers, ou toute autre personne ayant intérêt à ce que la prescription soit acquise, peuvent l’opposer, encore que le débiteur ou le propriétaire y renonce ; qu’en décidant, au contraire, que seul celui qui entend être considéré comme le propriétaire d’une parcelle peut invoquer la prescription acquisitive à son profit, la cour d’appel a violé l’article 2225 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008, applicable à la cause ;

2°/ qu’en opposant aux consorts Y… la chose jugée par l’arrêt de la cour d’appel de Poitiers du 3 décembre 2008 rendu dans une instance entre M. et Mme X… et l’Association immobilière du Poitou, à laquelle ils n’étaient pas parties, la cour d’appel a violé l’article 1351 du code civil ;

3°/ que les particuliers ont la libre disposition des biens qui leur appartiennent, et notamment le droit de les abandonner ; qu’en déniant aux consorts Y… le droit d’abandonner leur droit de propriété sur les rochers litigieux, la cour d’appel a violé l’article 537 du code civil ;

4°/ que les biens qui n’ont pas de maître appartiennent à la commune sur le territoire de laquelle ils sont situés ; que par délibération du conseil municipal, la commune peut renoncer à exercer ses droits, sur tout ou partie de son territoire, au profit de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont elle est membre ; que les biens sans maître sont alors réputés appartenir à l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ; que, toutefois, la propriété est transférée de plein droit à l’État si la commune renonce à exercer ses droits en l’absence de délibération telle que définie au premier alinéa ou si l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre renonce à exercer ses droits ; qu’en retenant que la seule hypothèse dans laquelle la loi permet que le bien d’un propriétaire connu soit dévolu à l’État, est celle dans laquelle, soit le propriétaire identifié est décédé sans héritiers, soit est décédé avec des héritiers ayant renoncé à la succession, la cour d’appel a violé les article 539 et 713 du code civil ;

5°/ qu’en retenant, pour écarter l’abandon de propriété invoqué par les consorts Y…, que la seule hypothèse dans laquelle la loi permet que le bien d’un propriétaire connu soit dévolu à l’État, est celle dans laquelle, soit le propriétaire identifié est décédé sans héritiers, soit est décédé avec des héritiers ayant renoncé à la succession, la cour d’appel s’est prononcée par un motif inopérant, et a violé les article 537 et 539 du code civil ;

6°/ qu’en se bornant à relever que, si c’est dans un contexte de tempête qu’est intervenu l’éboulement, celui-ci trouve sa cause profonde dans le défaut d’entretien permettant de consolider les lieux au fil du temps afin d’en assurer la stabilité et l’équilibre, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, quand bien même les lieux auraient été entretenus, la violence de la tempête de 1999 n’était pas telle que l’éboulement n’aurait pu être évité, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1384, alinéa 1er, du code civil ;

Mais attendu, d’une part, que, les consorts Y… ne s’étant prévalus d’aucun acte manifestant sans équivoque leur volonté de renoncer à leur droit de propriété et n’ayant pas invoqué les conditions dans lesquelles la falaise aurait pu, dans ce cas, devenir sans maître, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit, et partant irrecevable ;

Attendu, d’autre part, qu’ayant exactement retenu que seul celui qui revendique la propriété d’une parcelle peut invoquer la prescription acquisitive à son profit et relevé que, si l’éboulement était intervenu à la suite d’une tempête, il trouvait sa cause dans le défaut d’entretien permettant de consolider les lieux au fil du temps afin d’en assurer la stabilité et l’équilibre, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, qui n’a pas dénié aux consorts Y… le droit d’abandonner leur droit de propriété sur la falaise et ne leur a pas opposé l’autorité de la chose jugée attachée à une décision à laquelle ils n’étaient pas partie et qui a en a déduit à bon droit qu’ils étaient tenus à réparation, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les consorts Y… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne les consorts Y… à payer la somme de 3 000 euros à l’Association immobilière du Poitou et celle de 3 000 euros à M. et Mme X…; rejette la demande des consorts Y… ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour les consorts Y….

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné les consorts Y… à payer aux époux X… des dommages-intérêts au titre des travaux nécessaires à la consolidation de la falaise et au titre de la privation de jouissance ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « Les époux X… sont propriétaires d’une maison d’habitation avec jardin située … à Poitiers. Cet ensemble immobilier est contigu, côté ouest, à des rochers surplombant la vallée. Suite aux graves intempéries de fin décembre 1999, les époux X… ont eu à déplorer des éboulements de rochers dans leur cour et jardin. Ils ont fait assigner en réparation leur voisin immédiat à l’ouest, à savoir l’Association Immobilière du Poitou. Une expertise ayant eu pour objet notamment d’identifier le propriétaire de la falaise et donc des rochers à l’origine du dommage a conclu que ces rochers n’ont jamais fait l’objet de quelque cession que ce soit et sont demeurés la propriété des auteurs communs des parties à savoir les consorts Y…. Par jugement du tribunal de grande instance de Poitiers en date du 8 janvier 2007, confirmé par arrêt de la cour d’appel de Poitiers en date du 3 décembre 2008, la responsabilité de l’Association Immobilière du Poitou a été rejetée en ce qu’elle ne saurait être considérée comme propriétaire de la falaise surplombant le fonds des époux X…(…) Sur la propriété de la falaise : les parcelles de terrain appartenant aujourd’hui aux époux X… et à l’Association Immobilière du Poitou proviennent de la division d’une propriété appartenant aux consorts Y… ; le 22 mai 1956, les consorts Y… ont vendu à l’Association Immobilière du Poitou un ensemble immobilier en partie clos de murs. Cet ensemble immobilier, et en particulier les murs d’enceinte, se situent en haut de la falaise. Le 2 mai 1962, les consorts Y… ont vendu aux époux A… les parcelles alors cadastrées section B n° 584 et 585 situées en contrebas de la falaise. Par acte notarié du 16 août 1972, les époux A… ont revendu ces deux parcelles désormais cadastrées section AV n° 11 aux époux X…. L’acte mentionne que la propriété vendue est limitée à l’ouest par des rochers qui sont la propriété de l’Association Immobilière du Poitou, que dans ces rochers sont creusées des grottes dans lesquelles les acquéreurs n’auront pas le droit de pénétrer. Cet acte n’est nullement opposable à l’association. La confrontation des titres de propriété respectifs des époux X… d’une part, et de l’Association Immobilière du Poitou d’autre part, permet de constater qu’il existe un espace constitué de rochers situé entre les murs de l’association, au sommet de la falaise, et le terrain des époux X… en contrebas, espace qui n’a fait l’objet d’aucune cession. Force est donc de constater, que la falaise litigieuse et les rochers la constituant, sont demeurés la propriété des consorts Y…, comme l’expert B… a pu l’indiquer dans son rapport déposé le 30 novembre 2005. Les appelants, pour tenter de ne pas se voir déclarer propriétaires, prétendent d’une part, que la falaise aurait été acquise par usucapion par l’association, d’autre part, qu’ils en auraient abandonné la propriété. S’agissant de l’usucapion, il est constant que seul celui qui entend être considéré comme le propriétaire d’une parcelle, peut invoquer une telle prescription à son profit. Or sur ce point l’Association Immobilière du Poitou ne se positionne nullement comme revendiquant. S’agissant de l’abandon, la seule hypothèse dans laquelle la loi permet que le bien d’un propriétaire connu soit dévolu à l’État, est celle dans laquelle, soit le propriétaire identifié est décédé sans héritiers, soit est décédé avec des héritiers ayant renoncé à la succession. Tel n’est pas le cas en l’espèce.

(…)

Sur la réparation du préjudice des époux X…:

L’éboulement des rochers de la falaise ayant eu lieu à l’occasion de la tempête qui a sévi à la fin du mois de décembre 1999, les consorts Y… invoquent le cas de force majeure pour échapper à la responsabilité du fait des choses. Si c’est dans un contexte de tempête qu’est intervenu l’éboulement, celui-ci trouve sa cause profonde dans le défaut d’entretien permettant de consolider les lieux au fil du temps aux fins d’en assurer la stabilité et l’équilibre. Certes, les consorts Y… se défendent sur ce point, en faisant valoir qu’ils ne pouvaient entretenir un bien dont ils ignoraient qu’ils en fussent propriétaires. Cet argument ne demeure cependant pas opposable aux propriétaires riverains, victimes des dommages causés par le bien litigieux.

S’agissant des sommes à allouer, c’est de façon justifiée que le premier juge a retenu au titre :

— des travaux nécessaires à la consolidation de la falaise, la somme de 44. 524, 75 euros indexée sur l’indice BT 01 conformément au rapport d’expertise du 10 avril 2001,

— de la privation de jouissance de la cour et du jardin, la somme de 2. 286, 75 euros par an, soit la somme de 20. 800 euros arrêtée au 4 mai 2012.

Le jugement sera donc confirmé. La cour constatera cependant que l’action est éteinte à l’égard de Jeanne Y…, décédée en cours de procédure sans mise en cause de ses ayants-droit. Il y a lieu de faire droit à la demande d’actualisation au titre du préjudice de jouissance et de condamner les consorts Y… au paiement de la somme de 190, 56 euros par mois, de mai 2012, jusqu’à la date du présent arrêt. » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES, QUE : « Le jugement du tribunal de grande instance de Poitiers du 8 janvier 2007 et l’arrêt confirmatif de la cour d’appel du 3 décembre 2008 ont rejeté la responsabilité de l’association Immobilière du Poitou ; les consorts Y… doivent être déboutés de leur appel en garantie à l’encontre de ladite association et celle-ci se verra allouer une indemnité au titre des frais irrépétibles engagés mise à la charge des parties succombantes dans la présente instance ; en vertu de l’article 1384 du code civil, « on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des (…) choses que l’on a sous sa garde » ; les dommages causés en l’espèce par la chute des rochers doivent être indemnisés par les propriétaires de cette partie de la falaise ; il résulte de l’examen attentif du rapport d’expertise établi par Monsieur B… déposé le 30 novembre 2005, que les consorts Y… et leurs héritiers sont restés propriétaires de la falaise sise entre la propriété des époux X… et de la propriété de l’association Immobilière du Poitou ; en conséquence, ils doivent être déclarés responsables des dommages subis par les requérants depuis 1999 et condamnés à leur verser une indemnité au titre de leur préjudice de jouissance et au titre des travaux nécessaires à la consolidation de la falaise ; le montant de cette indemnité doit s’apprécier au regard des documents produits ; il résulte des documents pertinents produits à l’appui des demandes que les travaux nécessaires à la consolidation de la falaise ont été évalués par l’expert à la somme de 44. 524, 75 €, indexée sur l’indice BT 01, conformément au rapport d’expertise du 10 avril 2001 ; la privation de jouissance de la cour et du jardin depuis janvier 2000 justifie qu’il soit alloué aux consorts X… une somme de 2. 286, 75 euros par an, soit 20. 800 euros, somme arrêtée au 4 mai 2012 ; date de la demande en justice (conclusions signifiées par le RPVA) » ;

ALORS 1/ QUE les créanciers, ou toute autre personne ayant intérêt à ce que la prescription soit acquise, peuvent l’opposer, encore que le débiteur ou le propriétaire y renonce ; qu’en décidant, au contraire, que seul celui qui entend être considéré comme le propriétaire d’une parcelle peut invoquer la prescription acquisitive à son profit, la cour d’appel a violé l’article 2225 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008, applicable à la cause ;

ALORS 2/ QU’en opposant aux consorts Y… la chose jugée par l’arrêt de la cour d’appel de Poitiers du 3 décembre 2008 rendu dans une instance entre les époux X… et l’association Immobilière du Poitou, à laquelle ils n’étaient pas parties, la cour d’appel a violé l’article 1351 du code civil.

ALORS SUBSIDIAIREMENT 3/ QUE les particuliers ont la libre disposition des biens qui leur appartiennent, et notamment le droit de les abandonner ; qu’en déniant aux consorts Y… le droit d’abandonner leur droit de propriété sur les rochers litigieux, la cour d’appel a violé l’article 537 du code civil ;

ALORS SUBSIDIAIREMENT 4/ QUE les biens qui n’ont pas de maître appartiennent à la commune sur le territoire de laquelle ils sont situés ; que par délibération du conseil municipal, la commune peut renoncer à exercer ses droits, sur tout ou partie de son territoire, au profit de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont elle est membre ; que les biens sans maître sont alors réputés appartenir à l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ; que, toutefois, la propriété est transférée de plein droit à l’État si la commune renonce à exercer ses droits en l’absence de délibération telle que définie au premier alinéa ou si l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre renonce à exercer ses droits ; qu’en retenant que la seule hypothèse dans laquelle la loi permet que le bien d’un propriétaire connu soit dévolu à l’État, est celle dans laquelle, soit le propriétaire identifié est décédé sans héritiers, soit est décédé avec des héritiers ayant renoncé à la succession, la cour d’appel a violé les article 539 et 713 du code civil ;

ALORS SUBSIDIAIREMENT 5/ QU’en retenant, pour écarter l’abandon de propriété invoqué par les consorts Y…, que la seule hypothèse dans laquelle la loi permet que le bien d’un propriétaire connu soit dévolu à l’État, est celle dans laquelle, soit le propriétaire identifié est décédé sans héritiers, soit est décédé avec des héritiers ayant renoncé à la succession, la cour d’appel s’est prononcée par un motif inopérant, et a violé les article 537 et 539 du code civil ;

ALORS TRES SUBSIDIAIREMENT 6/ QU’en se bornant à relever que, si c’est dans un contexte de tempête qu’est intervenu l’éboulement, celui-ci trouve sa cause profonde dans le défaut d’entretien permettant de consolider les lieux au fil du temps afin d’en assurer la stabilité et l’équilibre, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, quand bien même les lieux auraient été entretenus, la violence de la tempête de 1999 n’était pas telle que l’éboulement n’aurait pu être évité, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1384 alinéa 1 du code civil."

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